Suisse au Niger : maintien des projets humanitaires malgré un contexte sécuritaire complexe
Contexte et engagement de la Suisse au Niger
Claudio Tognola se souvient de son séjour dans la savane ouest-africaine lorsqu’il était étudiant dans les années 1990. Le stage sur le terrain effectué au Niger, pays enclavé, a laissé une empreinte durable et un attachement à ce pays.
Aujourd’hui, il travaille pour la Direction du développement et de la coopération au Niger et son parcours l’a ramené dans une région marquée par les flux migratoires vers l’Europe, les rivalités entre grandes puissances et la violence djihadiste.
À l’époque, les déplacements avaient lieu sans les précautions de sécurité d’aujourd’hui et il se souvient avoir dormi parfois dans la brousse. Cette réalité a évolué et la sécurité demeure une préoccupation majeure pour les acteurs humanitaires.
Des enjeux complexes dans la région sahélienne
La région sahélienne, longue de 5400 kilomètres et riche en ressources, est confrontée à des crises qui se superposent et influencent les efforts européens pour contenir l’expansion russe, gérer les flux migratoires et prévenir les menaces terroristes. Le Niger figure sur l’un des principaux itinéraires migratoires menant vers le nord, passant par l’Algérie et la Libye, avant des traversées en Méditerranée vers des destinations comme l’Italie ou la Suisse.
Un projet d’approvisionnement en eau potable dans la région de Maradi, financé par la Direction du développement et de la coopération suisse, est programmé pour avril 2025.
Une situation qui se dégrade et les réponses humanitaires
Selon un rapport interne relayé par Swissinfo et citant l’Union européenne, plus de 90 attaques violentes ont été enregistrées au Niger entre juin et août.
La France et les États-Unis, historiquement présents sur le terrain, se sont retirés, et la Russie a pris une place croissante. La Suisse a choisi de rester et de poursuivre des projets de développement.
Réorientation des partenariats et implications régionales
Le coup d’État militaire de 2023 a renversé le gouvernement élu du président Mohamed Bazoum, qui entretenait des relations avec la France et les États‑Unis. Cette évolution a modifié les équilibres régionaux et renforcé l’influence russe dans certains secteurs, notamment autour de l’exploitation des ressources minérales.
Après le putsch, les armées française puis américaine ont quitté le Niger, tandis que des acteurs russes ont été décrits comme prenant part à certaines activités stratégiques et d’expertise technique. Des discussions publiques ont émergé sur les motivations des puissances étrangères et la gestion des ressources, y compris l’uranium.
Positionnement de la Suisse et objectifs humanitaires
Depuis ce repositionnement, la Suisse ajuste ses programmes afin d’éviter tout soutien direct au gouvernement en place, tout en maintenant un financement annuel autour de 22 à 23 millions de francs suisses, soit près de 15 % de l’enveloppe globale.
Claudio Tognola rappelle que la Suisse reconnaît les États et non les gouvernements et que ce cadre permet de préserver le dialogue tout en répondant aux besoins locaux. Il précise que 47 personnes sont mortes et 50’000 ont perdu leur domicile pendant la saison des pluies, et que les projets helvétiques soutiennent des initiatives visant à offrir des alternatives à la violence et à l’extrémisme chez les jeunes.
Des interventions éducatives et des projets locaux, comme des initiatives d’éducation alternative, sont déployés dans différentes zones, y compris Malgorou, en mars 2025.
Selon les responsables helvétiques, la pauvreté demeure une cause profonde de l’insécurité, facilitant le recrutement de jeunes par des organisations extrémistes; les programmes de coopération suisse au Niger s’attachent à traiter ces déterminants et à proposer des solutions concrètes.
