Parti démocrate américain : diversité des voix et unité stratégique face aux enjeux électoraux
Contexte électoral et premiers tests nationaux
Ce mardi, les États‑Unis voient se décliner des scrutins locaux d’ampleur nationale, avec les élections des gouverneurs en Virginie et dans le New Jersey, la redéfinition des circonscriptions en Californie et la course à la mairie de New York. Ces échéances serviront de baromètre pour mesurer l’état de la vie politique américaine et, plus largement, l’orientation du Parti démocrate, encore marqué neuf mois après la réélection de Donald Trump.
Un leadership partagé et l’absence d’un porte-drapeau
Lors d’un passage à Lausanne, Suzi LeVine, ancienne ambassadrice des États‑Unis en Suisse et aujourd’hui responsable du financement du Parti démocrate au niveau national, estime que l’absence d’une figure dominante n’est pas un signe de faiblesse mais une étape nécessaire. Selon elle, quand le parti n’est pas au pouvoir, il n’a pas de porte-drapeau unique et de nombreuses personnalités s’expriment, certaines plus médiatisées que d’autres.
Elle rappelle que des environnements mobilisés existent: près de sept millions d’Américains et d’Américaines ont participé aux récentes manifestations « No Kings » à travers le pays.
Le pluralisme comme objectif et réponse au contexte politique
Parmi les figures qui se détachent, elle évoque le gouverneur de Californie Gavin Newsom, réputé pour son interaction critique avec Trump, l’ancien secrétaire aux Transports Pete Buttigieg, actif dans les zones rurales, ainsi que des dirigeantes candidates Abigail Spanberger en Virginie et Mikie Sherrill dans le New Jersey. Ces visages différents partagent toutefois un même objectif: préserver la démocratie. Pour elle, tout ne peut pas reposer sur un seul individu.
Selon elle, le pluralisme est la clé aujourd’hui pour contrer le trumpisme et viser des victoires électorales, d’abord dans les États pivot comme la Virginie et le New Jersey, puis lors des élections législatives de mi-mandat en 2026. Cette diversité de profils serait un atout pour consolider les fondations démocrates et préparer l’échéance de 2028.
Des échéances 2028 et l’idée d’un leadership collectif
Pour désigner un porte-drapeau, il faudra patienter jusqu’au printemps 2028 et les primaires démocrates. C’est à ce moment-là que devrait être décidé le candidat à l’élection présidentielle, rappelle-t-elle. D’ici là, l’objectif est de « consolider notre démocratie » et d’accepter que les démocrates ne puissent pas rester strictement alignés sur un seul dogme idéologique.
Ce message s’adresse notamment à l’« élite démocrate » qui craint une gauche trop radicale, évoquée par Zoran Mamdani, jeune figure pressentie comme futur maire de New York. L’idée clé: l’objectif reste commun, mais les chemins pour l’atteindre peuvent varier et il existe plusieurs voies possibles pour y parvenir.
La vraie menace et le réveil des électeurs
Pour Suzi LeVine, la menace principale ne réside pas dans les dissensions internes mais dans l’apathie des électeurs. Le « canapé », c’est‑à‑dire le fait de rester chez soi au moment du vote, représente le plus grand danger pour le parti. Cependant, elle note un renouveau d’intérêt chez certains segments: jeunes, Latinos et Afro-Américains qui avaient glissé vers la droite en 2024 commencent à se repositionner, vers le centre ou, pour certains, vers la gauche, selon les sujets et les promesses.
Donald Trump, affirme-t-elle, sait diagnostiquer les problématiques mais propose des solutions perçues comme corrompues. Il serait selon elle une conséquence, et non une cause, d’un ensemble de dynamiques politiques.
Vers une bataille déterminante dès aujourd’hui
La bataille pour l’avenir des États‑Unis ne se joue pas uniquement en 2028: les résultats locaux et, surtout, les élections de mi-mandat en 2026 seront déterminants. Selon elle, il ne suffira pas de gagner d’un siège ou d’un point; il faudra une victoire écrasante pour éviter tout doute et prévenir ce qui serait une mise en pause de la démocratie face à un possible dirigeant autoritaire.
Propos recueillis par Eric Guevaraz-Frey. Texte pour le web: Fabien Grenon.
