Début du procès d’un ancien soldat britannique pour le Bloody Sunday en Irlande du Nord

Un procès historique pour un épisode emblématique des Troubles irlandais

Le 15 septembre 2025 marque le lancement du procès d’un ancien parachutiste britannique, accusé d’avoir participé aux événements du célèbre « Bloody Sunday » à Londonderry, en Irlande du Nord, en 1972. Jusqu’à présent, aucun soldat n’a été jugé pour cette journée tragique, au cours de laquelle 13 civils ont perdu la vie lors d’une manifestation pacifique.

Les circonstances et la controverse entourant le « Bloody Sunday »

Ce jour-là, l’armée britannique avait affirmé que ses parachutistes avaient agi en réponse aux tirs de l’Armée républicaine irlandaise (IRA), que la version officielle présentée à l’époque évoquait comme une réaction face à des « terroristes ». Cependant, de nombreux témoignages contredisant cette version ont été recueillis par la suite. Ce n’est qu’en 2010 que la responsabilité des forces britanniques dans la mort de civils, certains atteints par derrière ou même à terre avec un mouchoir blanc en signe de paix, a été officiellement reconnue.

Un procès emblématique avec des enjeux juridiques importants

L’ancien soldat surnommé « soldat F », appelé à comparaître depuis le début de la semaine, est jugé pour deux meurtres et cinq tentatives de meurtre. En décembre dernier, il avait plaidé non coupable devant le tribunal de Belfast et bénéficie d’un statut de liberté pendant la durée du procès, qui doit s’étaler sur plusieurs semaines. Il se présente dissimulé derrière un rideau, conformément à la demande de ses avocats, qui invoquent un risque pour sa sécurité personnelle.

Lors de l’audience, le procureur, Louis Mably, a indiqué que les tirs étaient injustifiés, soulignant que les civils ne représentaient aucune menace concrète pour les soldats et affirmant que ces derniers ne pouvaient croire à l’existence d’une réelle menace. Il a ajouté que l’intention derrière ces tirs semblait être de tuer ou, au minimum, de causer des blessures graves, ce qui pourrait constituer une infraction pénale grave.

Soutien aux familles et contexte judiciaire

Avant l’ouverture de la séance, plusieurs dizaines de proches des victimes s’étaient rassemblés devant le tribunal de Belfast, témoignant de leur solidarité. La justice nord-irlandaise avait initié ces poursuites en 2019, puis les avait suspendues avant de relancer l’enquête en 2022.

Un contexte juridique marqué par des lois controversées

Depuis la fin du conflit en Irlande du Nord, seule une condamnation a été prononcée à l’encontre d’un ancien soldat britannique, en début 2023. La peine de trois ans avec sursis concernait un militaire qui avait tué un homme par balle en 1988 lors d’un contrôle routier, expliquant qu’il s’était agi d’un tir accidentel dû à ses mains mouillées. La loi dite « Héritage et réconciliation », adoptée en 2023 par le précédent gouvernement conservateur, a prévu la suspension ou la fin de la majorité des poursuites pour crimes liés aux Troubles, une mesure vivement critiquée. Le parti travailliste a annoncé son intention d’abroger certaines dispositions de cette législation.

Ce procès, qui pourrait faire date, met en lumière la complexité de la justice face à des événements marquants de l’histoire récente de l’Irlande du Nord, tout en soulevant des questions sensibles sur la mémoire, la réconciliation et la responsabilité.

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